Je n’ai pas vraiment le temps de dire ouf. La musique reprend. Mais je suis incapable de me relever. John ne m’a pas répondu, où est-il. Je ne perçois pas son aura, j’arrive à me retourner, il n’est plus là… Mon sort de purification a été limité, mais comment. Je me relève je fais quelques pas vers le couloir, je m’effondre. Mon sens de l’équilibre de l’oreille interne est touché, mais je n’ai pas le temps de me poser de question. Je me relève, je m’effondre. Encore et encore, j’avance lentement. La musique continue.

- Rangu… Donnes-moi la force ! Le courage… de le sauver encore et encore…

Je saigne du nez. Je suis à bout de force, je m’écroule et cette fois je ne me relève pas. Mais une voix me tire des ténèbres « J’ai gagné, tu ne pourras pas le sauver cette fois… Il est à moi, il m’appartient et toi… Tu vas mourir ! »

- Ruta… Ma volonté sera toujours plus forte… Ne sous-estime pas une femme amoureuse…

Mon aura crépite d’éclairs lumineux. Je me mets sur les genoux, je suis devant la porte fermée où je ressens faiblement l’aura de Constantine. Je pose mes mains sur mon cœur. Je hurle les larmes aux yeux.

- BEBE !!!! JE T’AAAAAAIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIMEEEEEE !!!!

Mon aura explose de lumière. La porte est en train de disparaître, Talia veut le garder pour elle toute seule. HORS DE QUESTION ! Je pleure de peine, je ne peux pas mourir, ni le perdre ! alors qu’une solution, combattre !

- MAAAAAAAAAAAAAANOOOOOOOOOOOOOOOOOOOO !!! Pouvoir de l’amour pur !

Je laisse ma lumière exploser et la porte s’ouvre et John est littéralement expulsé de la pièce. Mon corps se meut tout seul et le récupère dans mes bras, mes jambes peuvent miraculeusement me porter, je sanglote dans ses bras…

- Bébé… bébé….

J’ai peur, je suis traumatisée, mon corps entier tremble.

- Tu… te me reconnais… hein… hein ? Elle… Elle n’a pas gagné, hein ?

Je lève les yeux vers lui, je crains qu’il me rejette, qu’il retourne avec elle, qu’il reste avec elle, qu’il m’abandonne, qu’il veuille ma mort. Pour son bonheur à elle. Pour elle. Mes larmes coulent abondamment le long de mes joues.

- Fais de moi ce que tu voudras… N’oublies jamais… Que je t’aime… Plus que tout, mon existence t’est totalement dévouée… Mon cœur, mon âme, je t’appartiens entièrement… Alors quoique tu décides… Je serai toujours à tes côtés, et mon amour t’accompagnera toujours…

Je l’embrasse dans un dernier élan de passion et d’amour pur. J’ai tellement peur qu’elle l’est sous son emprise, que je baisse toutes mes défenses, car je ne veux plus qu’il souffre, je ne veux plus qu’elle lui fasse du mal. Je lui appartiens pour toujours. Mon baiser dure aussi longtemps que j’en ai la force et aussi longtemps qu’il ne décide pas de me rejeter… Mon aura crépite. Comme dans un rêve, j’entends Talia hurler d’horreur… Puis plus rien, la maison retrouve un certain calme.

Il ne me rejette pas. Au contraire, il me tient solidement dans ses bras. J’ai eu tellement peur. J’espère que cette fois on en a réellement fini avec cette histoire. Il m’explique qu’il est tombé dans un piège, qu’il s’est fait avoir, que Talia a tout fait pour le faire souffrir et le faire tomber. Je caresse sa joue.

- Oh Mon amour… je suis là… je t’aime… Cramponne toi… On va y arriver…

Nous avançons dans le couloir, quand j’entends la musique, j’ai envie de hurler, oui, elle veut nous rendre dingue, nous faire souffrir jusqu’à la fin des temps. J’ai du mal à rester consciente. Il me demande de ne pas intervenir quoiqu’il se passe. Je rouvre les yeux, il me dépose délicatement au sol et avance vers une ombre que je crains reconnaître.

- Oh Mon Dieu… Astra…

Je sens la souffrance de John qui est mienne également. Je serre les poings. Ses mots le saignent. J’enrage de ne plus avoir de force. Elle commence à le gifler, des gifles de plus en plus fortes et violentes. Je pleure. J’ai mal. C’est une horreur de voir l’homme que j’aime se faire battre ainsi. Elle le frappe encore et encore. Je hurle

- Arrête Astra ! Je t’en conjure arrête ! Il n’est plus le même homme ! Je t’en supplie, laisse-le tranquille !

Mais elle continue, John est à terre, je hurle. Plus fort.

-NOOOOON !!! BEEEBEEEE !!!! ARRETE DE DIRE CA !!! CA FAIT TROP MAL ! JE T’AIME !

Quand il parle qu’elle le tue, je hurle d’horreur et de désespoir. Elle me regarde, elle a les yeux fous, injectés de sang. J’ai peur, je me sens désarmée, vulnérable. J’ai peur pour John encore plus que pour moi. Elle le relâche et elle bondit sur moi. Je crie malgré moi, elle n’a plus rien d’une humaine, mais un monstre de cauchemars. Elle n’arrive jamais à destination qu’elle est foudroyée par un éclair de John. Il redit des horreurs, Je trouve un peu de force et je fonce dans ses bras, je me blottis contre lui je le serre aussi fort que je peux.

- Oh bébé… ne dis plus jamais de telles horreurs… je t’aime… Si tu meures, je meure aussi…

Je lève des yeux implorants et noyés de larmes.

- Ne laisse pas Talia t’avoir, ou te tuer, ne la laisse pas gagner. Je t’aime ! Je me fiche de ce que tu as fait par le passé… Mais regarde-la… Elle n’a plus rien de la fillette, je sais que tu t’en veux, que tu te sens responsable, mais ce n’est pas elle, ce n’est plus elle, c’est un démon de ton passé dont Talia se sert pour nous détruire, ne la laisse pas faire mon loup je t’en conjure !

Je l’embrasse et avec mon débardeur je nettoie le sang sur ses lèvres.

- Cette moquerie sinistre a assez duré, on doit reprendre notre chez nous… Tous les deux, ou pas du tout !

Il me demande de ne pas mourir pour lui. J’en suis incapable.

- Bébé… On s’est promis de ne pas vivre l’un sans l’autre tu te rappelles, alors non, je refuse de vivre si tu n’es plus près de moi. Tu es mon soleil, ma vie, mon souffle, il est hors de question que je te laisse mourir, ou loin de moi dans les ténèbres…

Je n’insiste pas, je l’aime, ce n’est pas le moment ni l’endroit. Je caresse sa joue, je me calme enfin. Je suis trop faible, mais intérieurement j’enrage, je jure que Talia paiera ses crimes, peu importe le prix à payer.

Nous avançons malgré la musique qui hurle dans toute la maison. Je me cramponne au bras de John pour ne pas tomber. Il se met à chanter, le pire c’est qu’il a une super voix. Je suis de plus en plus certaine de vouloir l’entendre chanter plus souvent, et qui sait à terme, l’amener à rejouer de la guitare. Il me pousse en arrière doucement et se met devant moi alors que la porte éclate littéralement avant qu’un gros bonhomme étale John sous mes yeux. Il m’interdit d’intervenir, mais je ne peux même pas bouger. Il s’acharne sur John. Je finis par hurler et l’homme que je ne vois pas arriver dessus, m’en met une qui fait craquer les os de mon cou qui m’étale et qui me fait perdre connaissance, je ne bouge plus et mon nez saigne. C’est le noir complet.

Quand je reprends connaissance, je n’arrive pas à bouger, sonné par le choc du coup. Les sons sont comme déformés, des odeurs étranges de cochon grillé montent à mes narines. Je tente d’ouvrir les yeux, je vois trouble. Je ne vois quasiment que d’un seul œil, l’autre doit avoir un sacré cocard. Je gémis. Je n’ose pas bouger, ma tête est dans un caisson de basse qui cogne à fond, et cette musique qui en rajoute.

-J’en… j’en peux plus… Bébé… Je ne vais… Plus résister… longtemps… Je ne vais… pas pouvoir l’empêcher…

Ma peau marquée par différentes blessures et contusions se marquent de runes noires. Mes yeux virent au rouge et mon aura crépite de noir violasse.

- C’est ce que… Talia voulait… Depuis le début… Me pousser… A bout… En s’attaquant à toi… Tout ce qu’elle a réussi à faire… c’est renforcer et confirmer mes sentiments à ton égard… Mais je suis trop faible… Pour résister à ma magie interdite… Je… je ne vais pas tenir la pression… Aide-moi mon amour… Je t’en prie…

L’aura noire crépite et s’intensifie, la maison se met à craquer et la musique se met à se rayer comme si le disque avait pris des coups. Je prends ma tête dans mes mains, je gémis de plus en plus fort, telle la douleur et la souffrance est grande.

- Il faut que je tienne… Il faut que je tienne… Je ne dois pas céder !

« Tu es à moi petite sorcière… Laisse toi aller, ne résiste pas… »

Résonne la voix de Talia dans toute la maison.

« Je n’ai pas eu Constantine, mais toi je t’ai déjà… Tu m’appartiens, ton pouvoir et ton corps m’appartiennent ! »

Je grogne… « quand tout va mal, que la situation est inextricable, souris ! » Je me mets à sourire, version carnassière. Je me redresse, mon œil gauche est défiguré par le cocard et mon nez saigne abondamment. Mon œil valide oscille entre ma couleur naturelle et le rouge. Je me mets ensuite à sourire à pleine dents.

- Merci… Talia… Maintenant on sait où tu es… Bébé… Elle est à toi… Je t’aime ! Reviens moi… Vivant… Jiva Sheto… Le… Repos…Gardien de Vie…

Une tempête balaye l’aura noir et la fait rentrer par la bouche et le nez en moi, mes yeux crépitent de la même fumée noire et je m’effondre au sol, inconsciente, mon aura est redevenue normale. Le sort ne visait uniquement qu’à me faire perdre connaissance et éviter de participer aux sombres desseins de Talia.

Quand je rouvre les yeux, le couloir est un champ de bataille. Je ne vois que d’un œil, mon œil gauche est complètement fermé. Ma vision est trouble… Ma bouche est sèche… Je ne sais pas ce qu’il s’est passé ni combien de temps il s’est écoulé, mais… Je ne ressens plus la maison sans-dessus-dessous. Comme si enfin la pression de Talia avait disparue…

- Bé… bé…

Je le sens, il a réussi, mais ma vue décadente m’empêche de me rendre compte où il est. Je capte alors que j’ai son imperméable sur moi.

- bébé… réponds moi…

Je me retourne difficilement. Mon œil unique le décrit à terre, je me redresse, ou plutôt je rampe jusqu’à lui, son imperméable toujours sur mes épaules.

- Bébé, reste conscient, je t’aime… j’arrive…

Je rampe, aussi vite qu’il m’est donné de le faire. Je tends le bras vers son corps, ses vêtements sont en lambeaux et son corps est parcouru de coups de griffes et de brûlures. Je sens une énergie nouvelle m’habiter. Je me place à genoux et je prends le corps de John dans mes bras.

- C’est fini bébé… On a gagné… On a bien mérité notre repos…

Je serre son corps contre moi… Je sanglote. Il a les yeux fermés, j’ai peur, est-ce que finalement, Talia a réussi à le vaincre, à le tuer.

« Ne pleure pas Zalenya… Il est juste inconscient et épuisé. »

Une petite boule de lumière virevolte au-dessus de nous.

« Il t’aime… je me suis trompée sur votre relation… Peut-être que … Tu vas réussir là où j’ai si longtemps échoué… »

- Mère ?

« Tu vas peut-être arriver à sauver son âme de la damnation éternelle… Ton amour est pur, d’une pureté qui me dépasse largement… »

- Mère… je suis à bout… Que puis-je faire d’autres que de l’aimer ?

« Rien… Aide-le à panser ses blessures du passé, à panser les plaies de ses échecs… Montre lui que tu lui es infaillible et que quoiqu’il fasse, tu seras là… Moi je n’en ai pas eu la force… Tu es bien plus forte que moi… »

- Moi ? Plus forte ?

« Oui… Il préfèrerait mourir tout de suite que tu ne sois blessée par sa faute… Il est toujours aussi braveur, mais je sais maintenant que ses sentiments sont sincères… je te confère la force qu’il me reste, fais-en bonne usage ma fille… Tu es la digne héritière de notre lignée… »

La boule s’efface alors que ma magie revient plus forte… J’utilise un sort de vent pour soulever le jeune homme de terre et le ramener dans la chambre. Je l’allonge après l’avoir débarrassé de ce qu’il lui reste de vêtement, il n’a plus que son pantalon déchiré sur le dos. Je l’emmitoufle dans la couette et je l’installe confortablement dans notre lit. Je fais apparaître ce qu’il me faut et je m’affaire sur lui pendant deux bonnes heures. Les deux heures écoulées, il a un bandage neuf au torse et aux bras. Il a un pansement sur l’arcade sourcilière et des restes de contusions sur le visage et les épaules. Je sens qu’il est serein, qu’il est calme, qu’il dort sans rêve, profondément. Je souris… Je l’embrasse sur le front. Je me dirige vers la salle de bains, je me mets dans la cabine de douche tel quel. Je me sens sale, souillée. Je pleure en silence. Dans mon esprit, j’appelle au secours. Je n’en peux plus, je suis épuisée nerveusement et physiquement, je m’écroule à genoux dans le baquet et je pleure plus fort. J’ai l’impression d’être anéantie, épuisée. Et le seul homme capable de me relever est dans un sommeil profond. Je me sens seule, je me recroqueville sur moi-même alors que l’eau chaude coule, retirant sang et saletés de mon corps meurtri.

Une heure plus tard, je sors de la douche. Je suis comme un zombie. J’ai une gueule de déterrée encore plus avec mon œil au beurre noir et mon visage défiguré par les larmes. Je ne me suis même pas occupée de mes propres blessures… Je n’en ai absolument rien à faire, mon nez ne s’est pas vraiment arrêté de saigner complètement et mon œil continue d’enfler, il ne m’a pas loupé cet enfoiré.

Je réapparais dans la chambre comme l’ombre de moi-même. Je ne parviens même pas au lit, que je m’effondre vidée de toute énergie, épuisée par la longue lutte, et mon esprit qui ne veut plus rien savoir. Avant la totale inconscience, seul un nom résonne et perdure : Constantine.

Je sens qu’on me déplace, qu’on me transporte, je ressens aussi des petits picotements sur mes joues, mais rien, mon corps et mon esprit ne veulent plus rien savoir et sont en KO Technique. Je me sens soulagée pendant un court instant et moi qui avait tant froid, je retrouve un peu de chaleur. J’entends un écho lointain, qui me parle, qui me supplie de ne pas l’abandonner. Bébé, c’est toi ? John ? Ce n’est qu’un écho dans mes propres ténèbres. J’entends un rire diabolique, je sais que c’est le fruit de mon imagination, car Talia est vaincue pour le moment, mais elle m’a traumatisé cette garce.

Je sens un certain soulagement envahir mon corps. Quelqu’un me soigne, s’occupe de moi. Je laisse une larme s’échapper. Et mon œil valide s’ouvre. J’ai un bandage sur l’autre œil qui me fait moins mal. Mon nez est dans une sorte d’attelle de glace.

- ……

J’essaie de parler mais je n’arrive qu’à gémir. Je suis si épuisée que ça. Enfin la personne que j’avais envie de voir debout le plus au monde apparaît dans mon champ de vision réduit. Mon œil d’ouvre en grand et brille comme milles feux.

-Constantine… Tu es vivant…

Des larmes s’échappent de mes yeux et du bandage de l’autre œil… Je serre mon poing, je n’arrive pas à le faire décoller du lit… Je voudrais tant caresser son visage.

-Bébé… Mon ange…

Mon cerveau recommence à fonctionner, il y a beaucoup d’informations. Il y a quelques heures, c’était lui à ma place. Les rôles se sont échangés tout le naturellement du monde. J’arrive enfin à monter mon bras et poser ma main sur son visage, c’est bien réel. Ma vision se trouble puis redevient normale, je suis tellement affaiblie qu’un courant d’air m’enverrait valser…

-Viens… Viens près de moi… Tu es trop haut….

Mon bras retombe, c’est un soulagement de pouvoir le laisser reposer. Quand il vient à mes côtés, je me blottis contre lui. Je pleure.

-J’ai eu tellement peur… j’ai eu si peur… Je t’aime… ne me laisse plus… Plus jamais bébé… Je t’aime tant !